L’écume des jours

Publié le 2 Mai 2020

 

 

L'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre.

 

 

L’écume des jours

Voici un classique dont je n’avais lu que des extraits jusqu'à présent et dont je me doutais bien qu'il était pourtant un roman capable de s'ériger en incontournable de ma bibliothèque. L'occasion offerte par le confinement était belle : je me suis procurée ℒ '𝑒́𝒸𝓊𝓂𝑒 𝒹𝑒𝓈 𝒿𝑜𝓊𝓇𝓈 de Boris Vian et j'ai eu le plaisir de le lire enfin de bout en bout. C'est pour moi un énorme cup de ceur.

 

Deux histoires d'amour naissent et s'entremêlent : Colin, un jeune homme riche et élégant, rencontre et épouse Chloé, tandis que son ami Chick, admirateur excessif du philosophe Jean-Sol Partre, débute une relation avec Alise. Malheureusement, Chloé développe une maladie grave : un nénuphar pousse dans son poumon droit. Pour la soigner, le docteur prétend qu'il lui faut aller à la montagne et l'entourer de fleurs en permanence. Pour soigner sa bien-aimée, Colin va alors travailler autant qu'il le pourra et fleurir sa chambre sans relâche. Pourtant, le développement du nénuphar entraînera la mort de Chloé et le désespoir de Colin.

 

Roman d'amour, conte, critique sociale pleine d'humour burlesque : ℒ '𝑒́𝒸𝓊𝓂𝑒 𝒹𝑒𝓈 𝒿𝑜𝓊𝓇𝓈 c'est tout ça à la fois. Mais c'est aussi une fantaisie littéraire débridée, à la fois poétique et ludique. Le langage est fantasque et l'univers surprenant. En ouvrant le livre, on fait la connaissance de Colin, un jeune homme blond et gentil qui "𝓅𝒶𝓇𝓁𝒶𝒾𝓉 𝒹𝑜𝓊𝒸𝑒𝓂𝑒𝓃𝓉 𝒶𝓊𝓍 𝒻𝒾𝓁𝓁𝑒𝓈 𝑒𝓉 𝒿𝑜𝓎𝑒𝓊𝓈𝑒𝓂𝑒𝓃𝓉 𝒶𝓊𝓍 𝑔𝒶𝓇𝒸̧𝑜𝓃𝓈" et on est immergé dans un univers merveilleux où les comédons rentrent sous la peau en se voyant laids dans le miroir, où les souris aiment "𝒹𝒶𝓃𝓈𝑒𝓇 𝒶𝓊 𝓈𝑜𝓃 𝒹𝑒𝓈 𝒸𝒽𝑜𝒸𝓈 𝒹𝑒𝓈 𝓇𝒶𝓎𝑜𝓃𝓈 𝒹𝑒 𝓈𝑜𝓁𝑒𝒾𝓁 𝓈𝓊𝓇 𝓁𝑒𝓈 𝓇𝑜𝒷𝒾𝓃𝑒𝓉𝓈" et où les pianos peuvent fabriquer des cocktails. J'ai adoré les mots-valises, les néologismes et les métaphores créées par Boris Vian. Une grande partie de la poésie et de l'humour imprégnant son roman est liée au travail sur le langage. Il se manifeste par des inventions qui donne au récit sa tonalité fantaisiste, légère au départ puis de plus en plus noire. Car l'imagination déployée est au service d'une histoire d'amour magnifique mais néanmoins tragique. En outre, la satire et la caricature prennent place et dénoncent petit à petit des thématiques toujours d'actualité : la déshumanisation du monde du travail, l'industrie de l'armement, les dérives du consumérisme, de la célébrité, du système clérical.

 

Provocations joyeuses, prééminence des dialogues, récurrence de la thématique culinaire, objets et éléments de la faune et de la flore prêtés de vie et d'intentions, références appuyées au jazz, au surréalisme, à l'existentialisme et à la figure de Jean-Paul Sartre... bien des choses mériteraient d'être développées ici et beaucoup m'ont séduites. En refermant le livre je me suis dit que je reviendrai sans doute entre ces pages un jour et j'ai eu comme une folle envie d'aller flâner du côté de Saint-Germain-des-Prés.

 

 

 

 

Ils se turent quelques instants. Une carafe en profita pour émettre un son cristallin qui se répercuta sur les murs.

Ils marchaient, suivant le premier trottoir venu. Un petit nuage rose descendait de l'air et s'approcha d'eux.
- J'y vais ? proposa-t-il.
- Vas-y ! dit Colin, et le nuage les enveloppa.
À l'intérieur, il faisait chaud et ça sentait le sucre à la cannelle.

- Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse, ma Chloé ? demanda Colin.
- S'embrasser, dit Chloé.
- Sûr !... répondit Colin. Mais après ?
- Après, dit Chloé, je ne peux pas le dire tout haut.
- Bon ! dit Colin, mais après ?
- Après, dit Chloé, il sera l'heure de déjeuner.

Des fleurs vertes et bleues poussaient le long des trottoirs, et la sève serpentait autour de leurs tiges minces avec un léger bruit, humide comme un baiser d'escargot.

 

 

Rédigé par Nota Bene

Publié dans #Je lis

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