Appelez-moi Nathan
Publié le 29 Juin 2021
Voici une bande dessinée sur une thématique émergente dans les lycées : la transidentité. Ce sera l'un des thèmes forts de mon volet culturel l'année prochaine. J'ai déjà lu Mon père, ma mère, mes tremblements de terre sur cette question et d'autres suivront (un essai et un roman italien sont déjà dans ma PAL d'été). Nous suivons ici le parcours de Lila, adolescente née fille, qui à l'approche de la puberté se pose des dizaines de questions sur son corps et son identité. Pourquoi n'a-t-elle pas tout à fait les mêmes goûts que ses copines ? Qui est-elle vraiment ? Est-elle homosexuelle ? Fait-elle sa crise d'adolescence ? Petit à petit, elle va comprendre qu'elle se sent garçon et décidera de se faire appeler Nathan. Elle commencera, avec le soutien de ses parents, un processus de transformation avec des injections de testostérone chaque mois.
C'est une sorte de témoignage fictif sur les questionnements et le parcours d'un adolescent transgenre. La narration utilise un langage parlé, à hauteur d'adolescents, très abordable et lisible. Les illustrations à l'aquarelle sont douces et fluides. Au fil de ma lecture, j'ai été sceptique face au côté "on ne me comprend pas mais moi je sais maintenant et je vais m'affirmer quitte à bousculer la norme" mais j'ai aussi noté deux planches choc (l'une mettant en scène un violent fantasme d'arrachage des seins et l'autre une hypothétique opération de changement de sexe) qui permettent de ne pas rendre anodin et rose le parcours transidentitaire. Centré sur Lila / Nathan, le récit n'omet pas non plus la douleur et la dignité des parents et du petit frère dans cette situation oh combien bouleversante. D'ailleurs, outre la question centrale du genre, sont aussi évoqués des sujets tels que la scarification, le sexisme et l'homophobie. Le récit est didactique et éclairant. Il balaie les différents aspects de cette égarement d'un garçon dans un corps de fille : de sa prise de conscience à celle de l'entourage familial, amical et scolaire, jusqu'aux processus sentimentaux, médicaux, administratifs et sociaux. Pour autant, il ne répond pas à tous mes questionnements d'adulte sur le lien entre identité biologique (sexe) et identité genrée, nature et culture, et aussi sur les conséquences autour des questions familiales et procréatives.