Connaissant déjà quelque peu la collection Autres mondes des éditions Mango, séduite par le titre du livre et curieuse de découvrir l’écriture de cette auteur bretonne, je me suis laissée emporter par ce roman de science-fiction.
La quatrième de couverture :
À la suite de la Guerre Ultime, la Terre est recouverte par un gigantesque océan. Dans une immense bulle flottant au gré des courants, vivent quelques milliers d’habitants, seuls rescapés de ce chaos.
Parmi eux, deux adolescents que tout oppose. Elle, Natanae, fille de pêcheur, farouche et éprise de liberté. Le décès brutal de son père fait basculer sa vie et l’oblige à habiter chez sa mère où elle se retrouve confrontée à la violence de son beau-père.
Lui, Morphée, fils du plus haut dirigeant, passionné d’arts. Dans sa cage dorée, il souffre de solitude et de l’indifférence de ses parents. Il déteste ce monde que son père a créé.
L’abordage d’un continent sauvage va les faire se rencontrer. Vont-ils parvenir à fuir l’Archebulle, devenue une prison ?
Mon avis :
Outre le titre que je trouve tout à fait pertinent et sa structure à la façon d’une pièce de théâtre (acte I, acte II…), le roman s’ouvre sur un prologue assez percutant mettant en scène une planète Terre personnifiée qui « refuse de se laisser impunément brûler vive sans réagir ! ».
Nathalie Le Gendre nous propose au premier abord des personnages caricaturaux dans le sens que ce sont de jeunes adolescents issus de milieux sociaux opposés, qui n’ont pas pleinement conscience des enjeux de l’organisation sociale dans laquelle ils se trouvent mais qui, épris de liberté, sont des rebelles et donc des héros en puissance. Morphée, l’adolescent rêveur, irrésistiblement intéressé par l’héritage artistique de l’humanité désormais interdit et poète à ses heures et Natanae, l’adolescente fille de pêcheur au caractère affirmé.
Pourtant, on est bien vite pris par l’histoire. Natanae est confronté à un changement de vie – la mort subite de son père et l’arrivée chez sa mère – qui ne peut laisser indifférent. En effet, on découvre que son beau-père est alcoolique et violent. Sa mère insensible et battue. Sa jeune demi-sœur Thynie livrée à elle-même. Natanae va tout de suite s’attacher à elle et se faire un devoir de la protéger.
De son côté, Morphée va découvrir que son père, premier dirigeant de l'Archebulle, cache bien des choses à la population. Il prend de plus en plus conscience qu'il évolue dans une cage dorée. En parallèle, il rencontre Natanae et tombe sous le charme de cette jeune fille farouche à laquelle il offrira un exemplaire de l'oeuvre de Shakespeare Roméo et Juliette.
Le roman est construit comme un drame en trois actes comme je l’ai dit plus haut et on peut aussi remarquer que les scènes sont intitulées « Dimanche soir », « Lundi matin », « Dans la nuit de lundi à mardi », etc. En réalité, l'action est resserrée et se déroule sur 7 jours et 7 nuits. Genèse, vous avez dit genèse ? Il y a en effet dans ce roman beaucoup de références - mythologiques, bibliques, littéraires - pas toujours très subtiles mais qui enrichissent le récit.
En bref, un hymne à la fougue et au besoin de liberté palpitant en chacun de nous. Un roman de science-fiction qui est avant tout un récit initiatique et dont on apprécie l'héroïne sensible mais déterminée. La fin est ouverte ce qui est un peu frustrant mais laisse totalement la place à l'imagination.
Prologue :
Le bouton rouge… Je dois appuyer sur le bouton rouge…
2030. L’humanité est engagée dans un conflit sans fin dans lequel les armes les plus radicales sont utilisées : chimiques, bactériologiques, nucléaires. Dix ans de guerre, de souffrances, d’abominations. Urant toutes ces années, les cerveaux les plus vicieux ont été mis à l’épreuve pour élaborer, aveuglément, des plans fous, des solutions finales dans le but de déterminer un vainqueur…
Une seule issue est possible…
La main se soulève lentement, hésitante… Puis se crispe, déterminée, comme les serres d’un vautour. L’index se détend subitement et effleure d’une caresse mortelle le bouton rouge… Encore un bref instant d’incertitude, mais à quoi bon ? Et le doigt enfonce la touche couleur de sang…
Adieu…
Vomi par les satellites tueurs, un déluge de feu s’abat sur l’humanité.
Alors, dans un dernier sursaut, la Terre pousse un mugissement terrible. Un bruit assourdissant s’intensifie, perce les ténèbres et la brume des cendres humaines.
Elle, que les humains appellent Gaïa, la Terre-Mère, sent gronder en son sein la révolte. Elle, qui a enfanté les premiers êtres, nourri leurs enfants tout en acceptant leurs faiblesses, leur égoïsme, décide de ne pas se laisser anéantir. Elle qui a tant supporté pendant des siècles, refuse de se laisser impunément brûler vive sans réagir !
Mutilée, Gaïa souffre, rage, hurle…
Avec une force inouïe, elle se rebelle. Elle gonfle ses poumons, elle tonne, son sang jaillit des volcans, provoquant tremblements de terre, raz-de-marée, cyclones.
Prenant le pas sur la colère, la douleur se propage. Gaïa pleure toutes les larmes de son corps et engendre des océans dans lesquels s’abîment les continents. Elle s’arrête juste à temps pour ne pas sombrer dans son propre chagrin, dans sa propre furie, et fait naître du fluide de ses entrailles les contours d’un continent destiné à ses enfants survivants… S’il y en a.
Tel un grain de poussière illuminé flottant dans l’océan de Gaïa, une bulle de vie se dirige au gré du vent, de la mer et de ses courants, vers ce petit bout de terre vierge et sauvage…
Un mot de l'auteur :
« La science-fiction et la fantasy m’ont toujours passionnée. Est-ce dû aux fabuleuses légendes de mon pays ? [la Bretagne] J’en suis certaine. Vie et liberté : deux maîtres mots de mon existence. Dans les larmes de Gaïa, mon premier roman publié, s’est tout naturellement orienté vers ces deux thèmes. »
Plus d'infos sur :
Le site de la collection Autres mondes
Ricochet
NooSFere (avec un un quizz !)
Mais aussi le site de Nathalie Le Gendre et sa page Facebook
Le Gendre, Nathalie.
Dans les larmes de Gaïa
Ed. Mango
Coll. Autres mondes
2003/175 p.