Faites-les lire ! Pour en finir avec le crรฉtin digital

Publiรฉ le 3 Dรฉcembre 2023

Faites-les lire ! Pour en finir avec le crétin digital

 

๐—œ๐—ก๐—ง๐—ฅ๐—ข๐——๐—จ๐—–๐—ง๐—œ๐—ข๐—ก / ๐—ฃ๐—ฅ๐—ข๐—ฃ๐—ข๐—ฆ ๐——๐—จ ๐—Ÿ๐—œ๐—ฉ๐—ฅ๐—˜

 

Michel Desmurget est docteur en neurosciences et directeur de recherche à l'Inserm. Il est notamment l'auteur du livre La fabrique du crétin digital (2020) dans lequel il constatait l'ampleur de la consommation du numérique (smartphones, tablettes, télévision, etc.) par les nouvelles générations et pointait ses lourdes conséquences sur la santé, le comportement et les capacités intellectuelles.

 

Dans ce nouvel ouvrage, ๐—ถ๐—น ๐˜€๐˜†๐—ป๐˜๐—ต๐—ฒฬ๐˜๐—ถ๐˜€๐—ฒ ๐—ฝ๐—ผ๐˜‚๐—ฟ ๐—น๐—ฒ ๐—ด๐—ฟ๐—ฎ๐—ป๐—ฑ ๐—ฝ๐˜‚๐—ฏ๐—น๐—ถ๐—ฐ, ๐—ป๐—ผ๐˜๐—ฎ๐—บ๐—บ๐—ฒ๐—ป๐˜ ๐—น๐—ฒ๐˜€ ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฟ๐—ฒ๐—ป๐˜๐˜€, ๐—น๐—ฒ๐˜€ ๐—ฐ๐—ฒ๐—ป๐˜๐—ฎ๐—ถ๐—ป๐—ฒ๐˜€ ๐—ฑ'๐—ฒฬ๐˜๐˜‚๐—ฑ๐—ฒ๐˜€ ๐—พ๐˜‚๐—ถ ๐—ฑ๐—ฒฬ๐—บ๐—ผ๐—ป๐˜๐—ฟ๐—ฒ๐—ป๐˜ ๐—น๐—ฒ๐˜€ ๐—ฏ๐—ฒฬ๐—ป๐—ฒฬ๐—ณ๐—ถ๐—ฐ๐—ฒ๐˜€ ๐—บ๐—ฎ๐˜€๐˜€๐—ถ๐—ณ๐˜€ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—น๐—ฎ ๐—ฝ๐—ฟ๐—ฎ๐˜๐—ถ๐—พ๐˜‚๐—ฒ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—น๐—ฎ ๐—น๐—ฒ๐—ฐ๐˜๐˜‚๐—ฟ๐—ฒ (sur papier). Pour Michel Desmurget, la lecture plaisir est un antidote majeur à l'émergence du "crétin digital". Aucun autre loisir (bien que certains aient des effets positifs, comme le jeu libre, notamment symbolique, ou la pratique d'un instrument) n'offrirait aux enfants un éventail de bienfaits aussi large, nourrissant les trois piliers fondamentaux de leur humanité : les aptitudes intellectuelles, les compétences émotionnelles et les habiletés sociales. Les études montrent en effet l'impact positif de la pratique de la lecture (qui inclut le fait d'entendre des histoires lues par un tiers) sur : le développement du langage, la culture générale, la créativité, l'attention, les capacités de rédaction, les facultés d'expression orale, la compréhension d'autrui et de soi-même, etc. Le but de Michel Desmurget en écrivant ce livre est de démontrer, en s'appuyant sur des centaines d'études scientifiques françaises et internationales, que ๐—น๐—ฎ ๐—น๐—ฒ๐—ฐ๐˜๐˜‚๐—ฟ๐—ฒ "๐—ฝ๐—ผ๐˜‚๐—ฟ ๐—น๐—ฒ ๐—ฝ๐—น๐—ฎ๐—ถ๐˜€๐—ถ๐—ฟ" ๐—ป๐—ฒ ๐—ฐ๐—ผ๐—ป๐˜€๐˜๐—ถ๐˜๐˜‚๐—ฒ ๐—ป๐˜‚๐—น๐—น๐—ฒ๐—บ๐—ฒ๐—ป๐˜ ๐˜‚๐—ป๐—ฒ ๐—ฝ๐—ฟ๐—ฎ๐˜๐—ถ๐—พ๐˜‚๐—ฒ ๐—ฒฬ๐—น๐—ถ๐˜๐—ถ๐˜€๐˜๐—ฒ ๐—บ๐—ฎ๐—ถ๐˜€ "๐˜‚๐—ป ๐—ถ๐—บ๐—ฝ๐—ฒฬ๐—ฟ๐—ฎ๐˜๐—ถ๐—ณ ๐—ฎ๐—ถ๐—ด๐˜‚ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—ฑ๐—ฒฬ๐˜ƒ๐—ฒ๐—น๐—ผ๐—ฝ๐—ฝ๐—ฒ๐—บ๐—ฒ๐—ป๐˜ ๐—ฝ๐—ผ๐˜‚๐—ฟ ๐—ป๐—ผ๐˜€ ๐—ฒ๐—ป๐—ณ๐—ฎ๐—ป๐˜๐˜€".

 

 

๐—ฆ๐—ข๐— ๐— ๐—”๐—œ๐—ฅ๐—˜ / ๐—ฆ๐—ง๐—ฅ๐—จ๐—–๐—ง๐—จ๐—ฅ๐—”๐—ง๐—œ๐—ข๐—ก ๐——๐—จ ๐—ฃ๐—ฅ๐—ข๐—ฃ๐—ข๐—ฆ

 

๐——๐—ฎ๐—ป๐˜€ ๐˜‚๐—ป๐—ฒ ๐—ฝ๐—ฟ๐—ฒ๐—บ๐—ถ๐—ฒฬ€๐—ฟ๐—ฒ ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฟ๐˜๐—ถ๐—ฒ il expose le fait que les habitudes de lecture des jeunes générations sont en baisse et les conséquences qui en découlent sur les compétences scolaires. ๐——๐—ฎ๐—ป๐˜€ ๐˜‚๐—ป๐—ฒ ๐—ฑ๐—ฒ๐˜‚๐˜…๐—ถ๐—ฒฬ€๐—บ๐—ฒ ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฟ๐˜๐—ถ๐—ฒ, il nous explique en quoi la lecture est une compétence complexe qui va au-delà du décodage. ๐—œ๐—น ๐˜€๐—ผ๐˜‚๐—น๐—ถ๐—ด๐—ป๐—ฒ ๐—ฒ๐—ป๐˜€๐˜‚๐—ถ๐˜๐—ฒ le rôle irremplaçable du milieu familial pour l'apprentissage et le maintien des habitudes de lecture. ๐——๐—ฎ๐—ป๐˜€ ๐˜‚๐—ป๐—ฒ ๐—พ๐˜‚๐—ฎ๐˜๐—ฟ๐—ถ๐—ฒฬ€๐—บ๐—ฒ ๐—ฝ๐˜‚๐—ถ๐˜€ ๐—ฐ๐—ถ๐—ป๐—พ๐˜‚๐—ถ๐—ฒฬ€๐—บ๐—ฒ ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฟ๐˜๐—ถ๐—ฒ๐˜€, il indique que la lecture favorise l'appropriation de connaissances complexes et énumère les bienfaits scientifiquement documentés de la lecture sur le développement intellectuel, émotionnel et social. Enfin, dans un (trop) court ๐—ฒฬ๐—ฝ๐—ถ๐—น๐—ผ๐—ด๐˜‚๐—ฒ, Michel Desmurget rappelle que l'on ne devient pas lecteur par hasard mais par acculturation et qu'à défaut d'une solution miracle, il convient d'asseoir son "éducation à la lecture" sur trois piliers fondamentaux : la valorisation de l'activité, le développement du plaisir à pratiquer cette activité et la limitation de l'accès au numérique. Il conseille enfin ๐—ฑ๐—ฒ๐˜‚๐˜… ๐—น๐—ฒ๐˜ƒ๐—ถ๐—ฒ๐—ฟ๐˜€ ๐—ฝ๐—ฟ๐—ฎ๐˜๐—ถ๐—พ๐˜‚๐—ฒ๐˜€ ๐—ฝ๐—ผ๐˜‚๐—ฟ ๐—ฎ๐—ป๐—ฐ๐—ฟ๐—ฒ๐—ฟ ๐—น๐—ฎ ๐—น๐—ฒ๐—ฐ๐˜๐˜‚๐—ฟ๐—ฒ ๐—ฎ๐˜‚ ๐—ฐœ๐˜‚๐—ฟ ๐—ฑ๐—ฒ๐˜€ ๐—ต๐—ฎ๐—ฏ๐—ถ๐˜๐˜‚๐—ฑ๐—ฒ๐˜€ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—น'๐—ฒ๐—ป๐—ณ๐—ฎ๐—ป๐˜ : ๐—ท๐—ผ๐˜‚๐—ฒ๐—ฟ ๐—ฎ๐˜ƒ๐—ฒ๐—ฐ ๐—น๐—ฒ๐˜€ ๐˜€๐—ผ๐—ป๐˜€ (en soutenant les apprentissages scolaires de manière ludique et informelle) ๐—ฒ๐˜ ๐—ณ๐—ฎ๐˜ƒ๐—ผ๐—ฟ๐—ถ๐˜€๐—ฒ๐—ฟ ๐—น๐—ฎ ๐—น๐—ฒ๐—ฐ๐˜๐˜‚๐—ฟ๐—ฒ ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฟ๐˜๐—ฎ๐—ด๐—ฒฬ๐—ฒ (en sollicitant de différentes manières la parole de l'enfant).

 

 

๐—ฃ๐—ฅ๐—œ๐—ฆ๐—˜ ๐——๐—˜ ๐—ก๐—ข๐—ง๐—˜๐—ฆ / ๐—”๐—ฉ๐—œ๐—ฆ

 

Il prêche une convaincue... mais quelle satisfaction tout de même de voir écrit noir sur blanc par un scientifique tout ce dont mes convictions sont faites. Voici quelques uns des nombreux éléments relevés au fil de ma lecture qui m'ont paru importants, parlants et à retenir. D'abord une bonne nouvelle : ๐—น๐—ฒ๐˜€ ๐—ฒ๐—ป๐—ณ๐—ฎ๐—ป๐˜๐˜€ ๐—ฒ๐˜ ๐—ฎ๐—ฑ๐—ผ๐—น๐—ฒ๐˜€๐—ฐ๐—ฒ๐—ป๐˜๐˜€ ๐—ฑ๐—ถ๐˜€๐—ฒ๐—ป๐˜ ๐—ฎ๐—ถ๐—บ๐—ฒ๐—ฟ ๐—น๐—ถ๐—ฟ๐—ฒ ๐—ฒ๐˜ ๐—ฎ๐—ถ๐—บ๐—ฒ๐—ฟ ๐—พ๐˜‚'๐—ผ๐—ป ๐—น๐—ฒ๐˜‚๐—ฟ ๐—ฟ๐—ฎ๐—ฐ๐—ผ๐—ป๐˜๐—ฒ ๐—ฑ๐—ฒ๐˜€ ๐—ต๐—ถ๐˜€๐˜๐—ผ๐—ถ๐—ฟ๐—ฒ๐˜€. Il faut pourtant nuancer aussitôt : les enfants et adolescents des pays dits développés ๐—น๐—ถ๐˜€๐—ฒ๐—ป๐˜ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—บ๐—ผ๐—ถ๐—ป๐˜€ ๐—ฒ๐—ป ๐—บ๐—ผ๐—ถ๐—ป๐˜€ ๐—ฒ๐˜ ๐—ฎ๐˜‚๐˜€๐˜€๐—ถ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—บ๐—ผ๐—ถ๐—ป๐˜€ ๐—ฒ๐—ป ๐—บ๐—ผ๐—ถ๐—ป๐˜€ ๐—ฏ๐—ถ๐—ฒ๐—ป. Pour exemple, le nombre de mots lus par minute (en préservant la compréhension du texte) augmente avec l'âge et le niveau de compétence. En moyenne, un élève de Terminale lit 1,2 fois plus vite qu'un collégien de 6e (192 contre 165 mots par minute). Mais l'homologue de 1960 du lycéen lisait 237 mots par minute ! La question de la fluidité de la lecture n'est pas anecdotique (comme je pouvais le penser) : c'est un marqueur global de compréhension de textes et de réussite scolaire. En effet, on observe une corrélation entre les compétences en orthographe et la compréhension des textes. Plus un lecteur est compétent, plus sa vitesse de lecture est élevée et plus son orthographe est fiable. La société s'est adaptée en rognant sur les attendus scolaires et la complexité et la richesse lexicale des manuels et fictions adressés à la jeunesse.

 

L'auteur nous explique que la lecture est apparue après le langage oral donc que ๐—น๐—ฒ ๐—ฟ๐—ฒฬ๐˜€๐—ฒ๐—ฎ๐˜‚ ๐—ป๐—ฒ๐˜‚๐—ฟ๐—ผ๐—ป๐—ฎ๐—น qui permet la lecture est le fruit d'une adaptation génétique, d'où l'effort considérable que demande à chaque enfant le ciselage des maillages neuronaux. La première difficulté est ๐—น๐—ฒ ๐—ฑ๐—ฒฬ๐—ฐ๐—ผ๐—ฑ๐—ฎ๐—ด๐—ฒ (b et a font ba) puis la richesse lexicale et syntaxique de l'écrit, fabuleusement plus importante et subtile que l'oral. Apprendre à décoder c'est apprendre à extraire les régularités orthographiques. Les langues dites opaques compliquent à court terme l'acquisition du décodage tout en facilitant à long terme la fluidité de la lecture. Une langue opaque comme le français ou l'anglais c'est une langue où une lettre ou suite de lettres peut correspondre à des sons différents ("er" = fer ou manger) et où un son peut s'écrire de différentes manières ([ษ›] = gèle, seigle, merci, volley, est...). A l'inverse, l'italien, le grec ou encore le finlandais sont des langues transparentes où un phonème correspond à un graphème. Pour autant, plus un enfant lit, plus ses facultés de décodage se développent et s'automatisent.

 

Michel Desmurget explique évidemment tout cela de manière très détaillée. Il évoque à ce propos the fourth-grade slump ou "๐—น๐—ฎ ๐—ฑ๐—ฒฬ๐—ด๐—ฟ๐—ถ๐—ป๐—ด๐—ผ๐—น๐—ฎ๐—ฑ๐—ฒ ๐—ฑ๐˜‚ ๐—–๐— ๐Ÿญ". Il a été démontré que la contribution du décodage à la compréhension passait de 27% au CE1 à 13% au CM1 et à 2% en 4e. Il est donc primordiale d'être vigilant tout au long de l'apprentissage pour soutenir (l'apprentissage du décodage et la découverte lexicale) sans pour autant décourager (en proposant trop vite des textes trop riches). Michel Desmurget cite par exemple l'incipit d'un roman de M. Morpurgo, Le lion blanc, jugé accessible dès 9 ans, dans lequel le vocabulaire peut s'avérer "trop" riche pour un lecteur récalcitrant. On y trouve en effet des mots comme : chatoyant, croupin, engelure, babines...

 

Autre élément relevé au cours de ma lecture : il y a en moyenne plus de ๐—ฟ๐—ถ๐—ฐ๐—ต๐—ฒ๐˜€๐˜€๐—ฒ ๐—น๐—ถ๐—ป๐—ด๐˜‚๐—ถ๐˜€๐˜๐—ถ๐—พ๐˜‚๐—ฒ dans les livres jeunesse destinés aux moins de 5 ans que dans les échanges oraux les plus courants (discussions ou programmes TV, même dits "éducatifs"). Ainsi, Michel Desmurget conseille, pour assurer de bonnes fondations verbales à ses enfants, de leur parler tout de suite et beaucoup et de commencer tôt et finir tard à lire des histoires. Il a été mesuré que les bébés exposés à la lecture entre 3 et 6 mois ont de meilleures performances langagières à 5 ans. De même, les enfants de 4-5 ans privés de lecture partagée ont à 8-9 ans dix fois moins de chances d'être des lecteurs avancés et deux fois plus de risques de se retrouver en grande difficulté. Au-delà de la simple lecture, les parents qui, lisant un texte à leur progéniture, interrogent cette dernière sur la signification des mots et le sens de l'histoire, ne se contentent pas de soutenir le déploiement du langage et de l'attention ; ils inscrivent au cœur du cerveau de l'enfant toute une mécanique inconsciente d'évaluation du ๐—ฝ๐—ฟ๐—ผ๐—ฐ๐—ฒ๐˜€๐˜€๐˜‚๐˜€ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—ฐ๐—ผ๐—บ๐—ฝ๐—ฟ๐—ฒฬ๐—ต๐—ฒ๐—ป๐˜€๐—ถ๐—ผ๐—ป.

 

La lecture aide à construire sa pensée. Lire du contenu sur le web serait donc tout aussi bénéfique ? ๐—Ÿ๐—ฎ ๐—ฐ๐—ฎ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฐ๐—ถ๐˜๐—ฒฬ ๐—ฎฬ€ ๐˜‚๐˜๐—ถ๐—น๐—ถ๐˜€๐—ฒ๐—ฟ ๐—น๐—ฒ ๐—ด๐—ถ๐˜€๐—ฒ๐—บ๐—ฒ๐—ป๐˜ ๐˜๐—ฟ๐—ฒฬ€๐˜€ ๐—ฑ๐—ถ๐—ณ๐—ณ๐˜‚๐˜€, ๐—ฟ๐—ฒ๐—ฑ๐—ผ๐—ป๐—ฑ๐—ฎ๐—ป๐˜ ๐—ฒ๐˜ ๐—บ๐—ผ๐—ฟ๐—ฐ๐—ฒ๐—น๐—ฒฬ ๐—ฑ'๐—ถ๐—ป๐—ณ๐—ผ๐—ฟ๐—บ๐—ฎ๐˜๐—ถ๐—ผ๐—ป๐˜€ ๐˜€๐˜‚๐—ฟ ๐—น๐—ฎ ๐˜๐—ผ๐—ถ๐—น๐—ฒ ๐—ฑ๐—ฒฬ๐—ฝ๐—ฒ๐—ป๐—ฑ ๐—ฒ๐—น๐—น๐—ฒ ๐—ฎ๐˜‚๐˜€๐˜€๐—ถ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—น๐—ฎ ๐—ฐ๐—ฎ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฐ๐—ถ๐˜๐—ฒฬ ๐—ฎฬ€ ๐—น๐—ถ๐—ฟ๐—ฒ ๐—ฒ๐˜ ๐˜€๐—ฒ ๐—ฟ๐—ฒ๐—ฝ๐—ฒฬ๐—ฟ๐—ฒ๐—ฟ ๐—ฑ๐—ฎ๐—ป๐˜€ ๐˜‚๐—ป ๐—น๐—ถ๐˜ƒ๐—ฟ๐—ฒ. Michel Desmurget développe ce point vers la page 234. Sur le net, le détail et le fondamental se côtoient et les fake news se mélangent au véridique. Chaque requête engendre une montagne de réponses que l'internaute doit trier et évaluer. En cela, les livres sont moins exigeants pour le lecteur au sens où ils font peser le travail de structuration sur l'auteur. Les livres minimisent les risques de distraction et favorise une représentation mentale des éléments énoncés, donc une meilleure compréhension et une meilleure mémorisation. De plus, selon lui, tous les documents ne se valent pas : les livres de fiction ont un impact très positif sur le déploiement intellectuel, les journaux d'information un impact moindre, les magazines et bandes dessinées un impact neutre voire négatif en ce qui concerne la lecture sur écran. On peut noter que l'imagerie cérébrale a révélé les ravages des ๐—ฒฬ๐—ฐ๐—ฟ๐—ฎ๐—ป๐˜€ sur la mise en place des réseaux cérébraux du langage. L'objet-livre et sa comparaison avec son compère numérique est également traitée de manière tout à fait juste.

 

Un des grands avantages de la lecture c'est qu'elle développe ๐—น๐—ฒ๐˜€ ๐—ฎ๐—ฝ๐˜๐—ถ๐˜๐˜‚๐—ฑ๐—ฒ๐˜€ ๐˜€๐—ผ๐—ฐ๐—ถ๐—ผ-๐—ฒฬ๐—บ๐—ผ๐˜๐—ถ๐—ผ๐—ป๐—ป๐—ฒ๐—น๐—น๐—ฒ๐˜€. Éprouver les émotions des personnages, par exemple la trahison, ce n'est pas juste la comprendre, comme on lirait la définition du mot dans un dictionnaire, mais en faire l'expérience, à travers les actes, pensées et émotions du traître et du trahi. D'un point de vue cérébral, lire un mot comme "vomi" active l'aire cérébrale du dégoût. De même que le mot "sonnette" active l'aire du traitement des sons. On remarque aussi qu'il y a en littérature environ deux fois plus de descriptions d'émotions complexes (désespoir, soulagement, anxiété, irritation, fierté, intérêt...) que dans les échanges oraux (TV + radio). Ainsi, les livres développent l'empathie et la théorie de l'esprit. ๐—Ÿ'๐—ฒ๐—บ๐—ฝ๐—ฎ๐˜๐—ต๐—ถ๐—ฒ c'est le processus de reconnaissance et de partage de l'état cognitif et / ou affectif. Il existe notamment dans les livres pour enfant une forte concentration de termes et descriptions socio-émotionnelles (heureux, triste, accablé, espérer, imaginer...) : dans près d'une phrase sur trois ! ๐—Ÿ๐—ฎ ๐˜๐—ต๐—ฒฬ๐—ผ๐—ฟ๐—ถ๐—ฒ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—น'๐—ฒ๐˜€๐—ฝ๐—ฟ๐—ถ๐˜ c'est la capacité à deviner ce qu'une autre personne est en train de penser (prendre en compte des croyances différentes ou comprendre que quelqu'un peut, à dessein, cacher ses émotions). C'est d'autant plus important à savoir que des analyses montrent, nous dit Michel Desmurget, l'existence d'une dynamique d'augmentation du narcissisme et de déclin de l'empathie depuis les années 1980.

 

Michel  Desmurget souligne qu'une méta-analyse récente "confirme que le simple fait d'๐—ผ๐—ณ๐—ณ๐—ฟ๐—ถ๐—ฟ ๐—ฑ๐—ฒ๐˜€ ๐—น๐—ถ๐˜ƒ๐—ฟ๐—ฒ๐˜€ à des élèves accroît, quel que soit l'âge, la motivation à lire, le volume de pratique et le niveau de performance." il est aujourd'hui établi que le nombre d'ouvrages disponibles au sein d'un foyer est un prédicteur du devenir académique des enfants. Une large bibliothèque révèle l'importance que les parents accordent à la culture littéraire et à sa transmission ; même si en matière de lecture, rien ne remplace la persévérance. Un gros lecteur (= 31 min. / jour en moyenne) lit autant en 100 jours qu'un petit lecteur (1,8 min. / jour) en 10 ans.

 

๐—ฃ๐—ผ๐˜‚๐—ฟ ๐˜๐—ฒ๐—ฟ๐—บ๐—ถ๐—ป๐—ฒ๐—ฟ, ๐˜ƒ๐—ผ๐—ถ๐—ฐ๐—ถ ๐—ฐ๐—ฒ ๐—พ๐˜‚'๐—ถ๐—น ๐—ณ๐—ฎ๐˜‚๐˜ ๐—ฟ๐—ฒ๐˜๐—ฒ๐—ป๐—ถ๐—ฟ ๐—ฒ๐˜ ๐—ฒ๐—ป๐˜๐—ฟ๐—ฒ๐—ฝ๐—ฟ๐—ฒ๐—ป๐—ฑ๐—ฟ๐—ฒ ๐—ฒ๐—ป ๐˜๐—ฎ๐—ป๐˜ ๐—พ๐˜‚๐—ฒ ๐—ฝ๐—ฎ๐—ฟ๐—ฒ๐—ป๐˜ : 

  • ๐—ฉ๐—”๐—Ÿ๐—ข๐—ฅ๐—œ๐—ฆ๐—˜๐—ฅ ๐—น๐—ฎ ๐—น๐—ฒ๐—ฐ๐˜๐˜‚๐—ฟ๐—ฒ : encourager, féliciter, dire l'importance mais aussi montrer l'exemple : lire soi-même, leur lire des histoires, les emmener en bibliothèque et librairie, posséder des livres...
  • ๐——๐—˜๐—ฉ๐—˜๐—Ÿ๐—ข๐—ฃ๐—ฃ๐—˜๐—ฅ ๐—Ÿ๐—˜ ๐—ฃ๐—Ÿ๐—”๐—œ๐—ฆ๐—œ๐—ฅ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—น๐—ถ๐—ฟ๐—ฒ : leur lire des histoires et surtout poursuivre au-delà des premières acquisitions de décodage du CP. J'évoquais ces idées dans un article en avril 2020 : Mes 5 astuces pour faire de son enfant un lecteur.
  • ๐—Ÿ๐—œ๐— ๐—œ๐—ง๐—˜๐—ฅ ๐—น'๐—ฎ๐—ฐ๐—ฐ๐—ฒฬ€๐˜€ ๐—ฎ๐˜‚ ๐—ป๐˜‚๐—บ๐—ฒฬ๐—ฟ๐—ถ๐—พ๐˜‚๐—ฒ : ne pas dire "Si tu lis un peu tu auras le droit de..." mais plutôt se mettre d'accord avec l'enfant sur un temps / rythme de visionnage d'écran raisonnable ; au pire interdire et laisser le choix entre ne rien faire, faire la vaisselle et lire : le cerveau humain a horreur de l'ennui ๐Ÿ˜Š

 

Ce compte-rendu n'est bien sûr pas exhaustif et survol de multiples notions. Toute une partie consacrée à l'apprentissage du décodage est notamment particulièrement intéressante. Y sont détaillées les notions de VWFA (Visual Word Form Area), phonèmes, lettres hétéromorphes, conscience phonologique, etc. Michel Desmurget propose une présentation de son sujet claire, structurée et très intéressante. Je ressors de cette longue lecture à la fois plus riche de connaissances, rassérénée au sujet de l'importance accordée à cette passion au cœur de ma vie et de mon métier mais aussi, il faut l'avouer, un peu alarmée par certains constats détaillés. J'ai tous les jours face à moi des adolescents qui lisent de moins en moins et un fils à la charnière du décodage et de la "véritable" lecture. ๐——๐—ฒ ๐—พ๐˜‚๐—ผ๐—ถ ๐—ป๐—ผ๐˜‚๐—ฟ๐—ฟ๐—ถ๐—ฟ ๐—บ๐—ฎ ๐—ฟ๐—ฒฬ๐—ณ๐—น๐—ฒ๐˜…๐—ถ๐—ผ๐—ป, ๐—บ๐—ฎ ๐—ฝ๐—ฟ๐—ฎ๐˜๐—ถ๐—พ๐˜‚๐—ฒ ๐—พ๐˜‚๐—ผ๐˜๐—ถ๐—ฑ๐—ถ๐—ฒ๐—ป๐—ป๐—ฒ ๐—ฒ๐˜ ๐—บ๐—ผ๐—ป ๐—ฝ๐—น๐—ฎ๐—ถ๐˜€๐—ถ๐—ฟ ๐—ฑ๐—ฒ ๐—น๐—ถ๐—ฟ๐—ฒ.

 

[...] "intellos". Mot qui, pour nos enfants, relรจve dorรฉnavant quasiment de l'insulte. Une รฉvolution dont Ray Bradbury, auteur du mythique Fahrenheit 451, pressentait dรฉjร  l'inรฉluctabilitรฉ, dรจs le dรฉbut des annรฉes 1950, lorsqu'il faisait dire ร  l'un de ses personnages : "Pourquoi apprendre quoi que ce soit quand il suffit d'appuyer sur des boutons, de faire fonctionner des commutateurs, de serrer des vis et des รฉcrous ?"

Le dรฉcodage est au lecteur ce que la raquette est au tennisman : un รฉlรฉment essentiel mais inapte ร  fonder l'expertise.

L'รฉcrit est un langage ร  part, plus riche, divers et subtil que l'oral.

[...] Je pense qu'il est temps de renouer avec le mot. Je suis aussi coupable que quiconque d'avoir exaltรฉ l'image au dรฉtriment du mot. Mais seule une gรฉnรฉration de lecteurs engendrera une gรฉnรฉration d'รฉcrivains.

Citation de S. Spielberg en 1987

[...] les libraires et bibliothรฉcaires peuvent รชtre ici* d'un grand secours, par leurs compรฉtences (ร  chacun son mรฉtier), mais aussi leur patience, souvent remarquable !

* pour le choix d'un livre

Plus l'enfant est entourรฉ de livres et de lecteurs, plus il a de chances de lire, de lire prรฉcocement, de lire beaucoup et, au bout du compte, de lire efficacement.

Rรฉdigรฉ par Nota Bene

Publiรฉ dans #Je lis, #Je lis sur la lecture

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