Faites-les lire ! Pour en finir avec le crรฉtin digital
Publiรฉ le 3 Dรฉcembre 2023
๐๐ก๐ง๐ฅ๐ข๐๐จ๐๐ง๐๐ข๐ก / ๐ฃ๐ฅ๐ข๐ฃ๐ข๐ฆ ๐๐จ ๐๐๐ฉ๐ฅ๐
Michel Desmurget est docteur en neurosciences et directeur de recherche à l'Inserm. Il est notamment l'auteur du livre La fabrique du crétin digital (2020) dans lequel il constatait l'ampleur de la consommation du numérique (smartphones, tablettes, télévision, etc.) par les nouvelles générations et pointait ses lourdes conséquences sur la santé, le comportement et les capacités intellectuelles.
Dans ce nouvel ouvrage, ๐ถ๐น ๐๐๐ป๐๐ต๐ฒฬ๐๐ถ๐๐ฒ ๐ฝ๐ผ๐๐ฟ ๐น๐ฒ ๐ด๐ฟ๐ฎ๐ป๐ฑ ๐ฝ๐๐ฏ๐น๐ถ๐ฐ, ๐ป๐ผ๐๐ฎ๐บ๐บ๐ฒ๐ป๐ ๐น๐ฒ๐ ๐ฝ๐ฎ๐ฟ๐ฒ๐ป๐๐, ๐น๐ฒ๐ ๐ฐ๐ฒ๐ป๐๐ฎ๐ถ๐ป๐ฒ๐ ๐ฑ'๐ฒฬ๐๐๐ฑ๐ฒ๐ ๐พ๐๐ถ ๐ฑ๐ฒฬ๐บ๐ผ๐ป๐๐ฟ๐ฒ๐ป๐ ๐น๐ฒ๐ ๐ฏ๐ฒฬ๐ป๐ฒฬ๐ณ๐ถ๐ฐ๐ฒ๐ ๐บ๐ฎ๐๐๐ถ๐ณ๐ ๐ฑ๐ฒ ๐น๐ฎ ๐ฝ๐ฟ๐ฎ๐๐ถ๐พ๐๐ฒ ๐ฑ๐ฒ ๐น๐ฎ ๐น๐ฒ๐ฐ๐๐๐ฟ๐ฒ (sur papier). Pour Michel Desmurget, la lecture plaisir est un antidote majeur à l'émergence du "crétin digital". Aucun autre loisir (bien que certains aient des effets positifs, comme le jeu libre, notamment symbolique, ou la pratique d'un instrument) n'offrirait aux enfants un éventail de bienfaits aussi large, nourrissant les trois piliers fondamentaux de leur humanité : les aptitudes intellectuelles, les compétences émotionnelles et les habiletés sociales. Les études montrent en effet l'impact positif de la pratique de la lecture (qui inclut le fait d'entendre des histoires lues par un tiers) sur : le développement du langage, la culture générale, la créativité, l'attention, les capacités de rédaction, les facultés d'expression orale, la compréhension d'autrui et de soi-même, etc. Le but de Michel Desmurget en écrivant ce livre est de démontrer, en s'appuyant sur des centaines d'études scientifiques françaises et internationales, que ๐น๐ฎ ๐น๐ฒ๐ฐ๐๐๐ฟ๐ฒ "๐ฝ๐ผ๐๐ฟ ๐น๐ฒ ๐ฝ๐น๐ฎ๐ถ๐๐ถ๐ฟ" ๐ป๐ฒ ๐ฐ๐ผ๐ป๐๐๐ถ๐๐๐ฒ ๐ป๐๐น๐น๐ฒ๐บ๐ฒ๐ป๐ ๐๐ป๐ฒ ๐ฝ๐ฟ๐ฎ๐๐ถ๐พ๐๐ฒ ๐ฒฬ๐น๐ถ๐๐ถ๐๐๐ฒ ๐บ๐ฎ๐ถ๐ "๐๐ป ๐ถ๐บ๐ฝ๐ฒฬ๐ฟ๐ฎ๐๐ถ๐ณ ๐ฎ๐ถ๐ด๐ ๐ฑ๐ฒ ๐ฑ๐ฒฬ๐๐ฒ๐น๐ผ๐ฝ๐ฝ๐ฒ๐บ๐ฒ๐ป๐ ๐ฝ๐ผ๐๐ฟ ๐ป๐ผ๐ ๐ฒ๐ป๐ณ๐ฎ๐ป๐๐".
๐ฆ๐ข๐ ๐ ๐๐๐ฅ๐ / ๐ฆ๐ง๐ฅ๐จ๐๐ง๐จ๐ฅ๐๐ง๐๐ข๐ก ๐๐จ ๐ฃ๐ฅ๐ข๐ฃ๐ข๐ฆ
๐๐ฎ๐ป๐ ๐๐ป๐ฒ ๐ฝ๐ฟ๐ฒ๐บ๐ถ๐ฒฬ๐ฟ๐ฒ ๐ฝ๐ฎ๐ฟ๐๐ถ๐ฒ il expose le fait que les habitudes de lecture des jeunes générations sont en baisse et les conséquences qui en découlent sur les compétences scolaires. ๐๐ฎ๐ป๐ ๐๐ป๐ฒ ๐ฑ๐ฒ๐๐ ๐ถ๐ฒฬ๐บ๐ฒ ๐ฝ๐ฎ๐ฟ๐๐ถ๐ฒ, il nous explique en quoi la lecture est une compétence complexe qui va au-delà du décodage. ๐๐น ๐๐ผ๐๐น๐ถ๐ด๐ป๐ฒ ๐ฒ๐ป๐๐๐ถ๐๐ฒ le rôle irremplaçable du milieu familial pour l'apprentissage et le maintien des habitudes de lecture. ๐๐ฎ๐ป๐ ๐๐ป๐ฒ ๐พ๐๐ฎ๐๐ฟ๐ถ๐ฒฬ๐บ๐ฒ ๐ฝ๐๐ถ๐ ๐ฐ๐ถ๐ป๐พ๐๐ถ๐ฒฬ๐บ๐ฒ ๐ฝ๐ฎ๐ฟ๐๐ถ๐ฒ๐, il indique que la lecture favorise l'appropriation de connaissances complexes et énumère les bienfaits scientifiquement documentés de la lecture sur le développement intellectuel, émotionnel et social. Enfin, dans un (trop) court ๐ฒฬ๐ฝ๐ถ๐น๐ผ๐ด๐๐ฒ, Michel Desmurget rappelle que l'on ne devient pas lecteur par hasard mais par acculturation et qu'à défaut d'une solution miracle, il convient d'asseoir son "éducation à la lecture" sur trois piliers fondamentaux : la valorisation de l'activité, le développement du plaisir à pratiquer cette activité et la limitation de l'accès au numérique. Il conseille enfin ๐ฑ๐ฒ๐๐ ๐น๐ฒ๐๐ถ๐ฒ๐ฟ๐ ๐ฝ๐ฟ๐ฎ๐๐ถ๐พ๐๐ฒ๐ ๐ฝ๐ผ๐๐ฟ ๐ฎ๐ป๐ฐ๐ฟ๐ฒ๐ฟ ๐น๐ฎ ๐น๐ฒ๐ฐ๐๐๐ฟ๐ฒ ๐ฎ๐ ๐ฐœ๐๐ฟ ๐ฑ๐ฒ๐ ๐ต๐ฎ๐ฏ๐ถ๐๐๐ฑ๐ฒ๐ ๐ฑ๐ฒ ๐น'๐ฒ๐ป๐ณ๐ฎ๐ป๐ : ๐ท๐ผ๐๐ฒ๐ฟ ๐ฎ๐๐ฒ๐ฐ ๐น๐ฒ๐ ๐๐ผ๐ป๐ (en soutenant les apprentissages scolaires de manière ludique et informelle) ๐ฒ๐ ๐ณ๐ฎ๐๐ผ๐ฟ๐ถ๐๐ฒ๐ฟ ๐น๐ฎ ๐น๐ฒ๐ฐ๐๐๐ฟ๐ฒ ๐ฝ๐ฎ๐ฟ๐๐ฎ๐ด๐ฒฬ๐ฒ (en sollicitant de différentes manières la parole de l'enfant).
๐ฃ๐ฅ๐๐ฆ๐ ๐๐ ๐ก๐ข๐ง๐๐ฆ / ๐๐ฉ๐๐ฆ
Il prêche une convaincue... mais quelle satisfaction tout de même de voir écrit noir sur blanc par un scientifique tout ce dont mes convictions sont faites. Voici quelques uns des nombreux éléments relevés au fil de ma lecture qui m'ont paru importants, parlants et à retenir. D'abord une bonne nouvelle : ๐น๐ฒ๐ ๐ฒ๐ป๐ณ๐ฎ๐ป๐๐ ๐ฒ๐ ๐ฎ๐ฑ๐ผ๐น๐ฒ๐๐ฐ๐ฒ๐ป๐๐ ๐ฑ๐ถ๐๐ฒ๐ป๐ ๐ฎ๐ถ๐บ๐ฒ๐ฟ ๐น๐ถ๐ฟ๐ฒ ๐ฒ๐ ๐ฎ๐ถ๐บ๐ฒ๐ฟ ๐พ๐'๐ผ๐ป ๐น๐ฒ๐๐ฟ ๐ฟ๐ฎ๐ฐ๐ผ๐ป๐๐ฒ ๐ฑ๐ฒ๐ ๐ต๐ถ๐๐๐ผ๐ถ๐ฟ๐ฒ๐. Il faut pourtant nuancer aussitôt : les enfants et adolescents des pays dits développés ๐น๐ถ๐๐ฒ๐ป๐ ๐ฑ๐ฒ ๐บ๐ผ๐ถ๐ป๐ ๐ฒ๐ป ๐บ๐ผ๐ถ๐ป๐ ๐ฒ๐ ๐ฎ๐๐๐๐ถ ๐ฑ๐ฒ ๐บ๐ผ๐ถ๐ป๐ ๐ฒ๐ป ๐บ๐ผ๐ถ๐ป๐ ๐ฏ๐ถ๐ฒ๐ป. Pour exemple, le nombre de mots lus par minute (en préservant la compréhension du texte) augmente avec l'âge et le niveau de compétence. En moyenne, un élève de Terminale lit 1,2 fois plus vite qu'un collégien de 6e (192 contre 165 mots par minute). Mais l'homologue de 1960 du lycéen lisait 237 mots par minute ! La question de la fluidité de la lecture n'est pas anecdotique (comme je pouvais le penser) : c'est un marqueur global de compréhension de textes et de réussite scolaire. En effet, on observe une corrélation entre les compétences en orthographe et la compréhension des textes. Plus un lecteur est compétent, plus sa vitesse de lecture est élevée et plus son orthographe est fiable. La société s'est adaptée en rognant sur les attendus scolaires et la complexité et la richesse lexicale des manuels et fictions adressés à la jeunesse.
L'auteur nous explique que la lecture est apparue après le langage oral donc que ๐น๐ฒ ๐ฟ๐ฒฬ๐๐ฒ๐ฎ๐ ๐ป๐ฒ๐๐ฟ๐ผ๐ป๐ฎ๐น qui permet la lecture est le fruit d'une adaptation génétique, d'où l'effort considérable que demande à chaque enfant le ciselage des maillages neuronaux. La première difficulté est ๐น๐ฒ ๐ฑ๐ฒฬ๐ฐ๐ผ๐ฑ๐ฎ๐ด๐ฒ (b et a font ba) puis la richesse lexicale et syntaxique de l'écrit, fabuleusement plus importante et subtile que l'oral. Apprendre à décoder c'est apprendre à extraire les régularités orthographiques. Les langues dites opaques compliquent à court terme l'acquisition du décodage tout en facilitant à long terme la fluidité de la lecture. Une langue opaque comme le français ou l'anglais c'est une langue où une lettre ou suite de lettres peut correspondre à des sons différents ("er" = fer ou manger) et où un son peut s'écrire de différentes manières ([ษ] = gèle, seigle, merci, volley, est...). A l'inverse, l'italien, le grec ou encore le finlandais sont des langues transparentes où un phonème correspond à un graphème. Pour autant, plus un enfant lit, plus ses facultés de décodage se développent et s'automatisent.
Michel Desmurget explique évidemment tout cela de manière très détaillée. Il évoque à ce propos the fourth-grade slump ou "๐น๐ฎ ๐ฑ๐ฒฬ๐ด๐ฟ๐ถ๐ป๐ด๐ผ๐น๐ฎ๐ฑ๐ฒ ๐ฑ๐ ๐๐ ๐ญ". Il a été démontré que la contribution du décodage à la compréhension passait de 27% au CE1 à 13% au CM1 et à 2% en 4e. Il est donc primordiale d'être vigilant tout au long de l'apprentissage pour soutenir (l'apprentissage du décodage et la découverte lexicale) sans pour autant décourager (en proposant trop vite des textes trop riches). Michel Desmurget cite par exemple l'incipit d'un roman de M. Morpurgo, Le lion blanc, jugé accessible dès 9 ans, dans lequel le vocabulaire peut s'avérer "trop" riche pour un lecteur récalcitrant. On y trouve en effet des mots comme : chatoyant, croupin, engelure, babines...
Autre élément relevé au cours de ma lecture : il y a en moyenne plus de ๐ฟ๐ถ๐ฐ๐ต๐ฒ๐๐๐ฒ ๐น๐ถ๐ป๐ด๐๐ถ๐๐๐ถ๐พ๐๐ฒ dans les livres jeunesse destinés aux moins de 5 ans que dans les échanges oraux les plus courants (discussions ou programmes TV, même dits "éducatifs"). Ainsi, Michel Desmurget conseille, pour assurer de bonnes fondations verbales à ses enfants, de leur parler tout de suite et beaucoup et de commencer tôt et finir tard à lire des histoires. Il a été mesuré que les bébés exposés à la lecture entre 3 et 6 mois ont de meilleures performances langagières à 5 ans. De même, les enfants de 4-5 ans privés de lecture partagée ont à 8-9 ans dix fois moins de chances d'être des lecteurs avancés et deux fois plus de risques de se retrouver en grande difficulté. Au-delà de la simple lecture, les parents qui, lisant un texte à leur progéniture, interrogent cette dernière sur la signification des mots et le sens de l'histoire, ne se contentent pas de soutenir le déploiement du langage et de l'attention ; ils inscrivent au cœur du cerveau de l'enfant toute une mécanique inconsciente d'évaluation du ๐ฝ๐ฟ๐ผ๐ฐ๐ฒ๐๐๐๐ ๐ฑ๐ฒ ๐ฐ๐ผ๐บ๐ฝ๐ฟ๐ฒฬ๐ต๐ฒ๐ป๐๐ถ๐ผ๐ป.
La lecture aide à construire sa pensée. Lire du contenu sur le web serait donc tout aussi bénéfique ? ๐๐ฎ ๐ฐ๐ฎ๐ฝ๐ฎ๐ฐ๐ถ๐๐ฒฬ ๐ฎฬ ๐๐๐ถ๐น๐ถ๐๐ฒ๐ฟ ๐น๐ฒ ๐ด๐ถ๐๐ฒ๐บ๐ฒ๐ป๐ ๐๐ฟ๐ฒฬ๐ ๐ฑ๐ถ๐ณ๐ณ๐๐, ๐ฟ๐ฒ๐ฑ๐ผ๐ป๐ฑ๐ฎ๐ป๐ ๐ฒ๐ ๐บ๐ผ๐ฟ๐ฐ๐ฒ๐น๐ฒฬ ๐ฑ'๐ถ๐ป๐ณ๐ผ๐ฟ๐บ๐ฎ๐๐ถ๐ผ๐ป๐ ๐๐๐ฟ ๐น๐ฎ ๐๐ผ๐ถ๐น๐ฒ ๐ฑ๐ฒฬ๐ฝ๐ฒ๐ป๐ฑ ๐ฒ๐น๐น๐ฒ ๐ฎ๐๐๐๐ถ ๐ฑ๐ฒ ๐น๐ฎ ๐ฐ๐ฎ๐ฝ๐ฎ๐ฐ๐ถ๐๐ฒฬ ๐ฎฬ ๐น๐ถ๐ฟ๐ฒ ๐ฒ๐ ๐๐ฒ ๐ฟ๐ฒ๐ฝ๐ฒฬ๐ฟ๐ฒ๐ฟ ๐ฑ๐ฎ๐ป๐ ๐๐ป ๐น๐ถ๐๐ฟ๐ฒ. Michel Desmurget développe ce point vers la page 234. Sur le net, le détail et le fondamental se côtoient et les fake news se mélangent au véridique. Chaque requête engendre une montagne de réponses que l'internaute doit trier et évaluer. En cela, les livres sont moins exigeants pour le lecteur au sens où ils font peser le travail de structuration sur l'auteur. Les livres minimisent les risques de distraction et favorise une représentation mentale des éléments énoncés, donc une meilleure compréhension et une meilleure mémorisation. De plus, selon lui, tous les documents ne se valent pas : les livres de fiction ont un impact très positif sur le déploiement intellectuel, les journaux d'information un impact moindre, les magazines et bandes dessinées un impact neutre voire négatif en ce qui concerne la lecture sur écran. On peut noter que l'imagerie cérébrale a révélé les ravages des ๐ฒฬ๐ฐ๐ฟ๐ฎ๐ป๐ sur la mise en place des réseaux cérébraux du langage. L'objet-livre et sa comparaison avec son compère numérique est également traitée de manière tout à fait juste.
Un des grands avantages de la lecture c'est qu'elle développe ๐น๐ฒ๐ ๐ฎ๐ฝ๐๐ถ๐๐๐ฑ๐ฒ๐ ๐๐ผ๐ฐ๐ถ๐ผ-๐ฒฬ๐บ๐ผ๐๐ถ๐ผ๐ป๐ป๐ฒ๐น๐น๐ฒ๐. Éprouver les émotions des personnages, par exemple la trahison, ce n'est pas juste la comprendre, comme on lirait la définition du mot dans un dictionnaire, mais en faire l'expérience, à travers les actes, pensées et émotions du traître et du trahi. D'un point de vue cérébral, lire un mot comme "vomi" active l'aire cérébrale du dégoût. De même que le mot "sonnette" active l'aire du traitement des sons. On remarque aussi qu'il y a en littérature environ deux fois plus de descriptions d'émotions complexes (désespoir, soulagement, anxiété, irritation, fierté, intérêt...) que dans les échanges oraux (TV + radio). Ainsi, les livres développent l'empathie et la théorie de l'esprit. ๐'๐ฒ๐บ๐ฝ๐ฎ๐๐ต๐ถ๐ฒ c'est le processus de reconnaissance et de partage de l'état cognitif et / ou affectif. Il existe notamment dans les livres pour enfant une forte concentration de termes et descriptions socio-émotionnelles (heureux, triste, accablé, espérer, imaginer...) : dans près d'une phrase sur trois ! ๐๐ฎ ๐๐ต๐ฒฬ๐ผ๐ฟ๐ถ๐ฒ ๐ฑ๐ฒ ๐น'๐ฒ๐๐ฝ๐ฟ๐ถ๐ c'est la capacité à deviner ce qu'une autre personne est en train de penser (prendre en compte des croyances différentes ou comprendre que quelqu'un peut, à dessein, cacher ses émotions). C'est d'autant plus important à savoir que des analyses montrent, nous dit Michel Desmurget, l'existence d'une dynamique d'augmentation du narcissisme et de déclin de l'empathie depuis les années 1980.
Michel Desmurget souligne qu'une méta-analyse récente "confirme que le simple fait d'๐ผ๐ณ๐ณ๐ฟ๐ถ๐ฟ ๐ฑ๐ฒ๐ ๐น๐ถ๐๐ฟ๐ฒ๐ à des élèves accroît, quel que soit l'âge, la motivation à lire, le volume de pratique et le niveau de performance." il est aujourd'hui établi que le nombre d'ouvrages disponibles au sein d'un foyer est un prédicteur du devenir académique des enfants. Une large bibliothèque révèle l'importance que les parents accordent à la culture littéraire et à sa transmission ; même si en matière de lecture, rien ne remplace la persévérance. Un gros lecteur (= 31 min. / jour en moyenne) lit autant en 100 jours qu'un petit lecteur (1,8 min. / jour) en 10 ans.
๐ฃ๐ผ๐๐ฟ ๐๐ฒ๐ฟ๐บ๐ถ๐ป๐ฒ๐ฟ, ๐๐ผ๐ถ๐ฐ๐ถ ๐ฐ๐ฒ ๐พ๐'๐ถ๐น ๐ณ๐ฎ๐๐ ๐ฟ๐ฒ๐๐ฒ๐ป๐ถ๐ฟ ๐ฒ๐ ๐ฒ๐ป๐๐ฟ๐ฒ๐ฝ๐ฟ๐ฒ๐ป๐ฑ๐ฟ๐ฒ ๐ฒ๐ป ๐๐ฎ๐ป๐ ๐พ๐๐ฒ ๐ฝ๐ฎ๐ฟ๐ฒ๐ป๐ :
- ๐ฉ๐๐๐ข๐ฅ๐๐ฆ๐๐ฅ ๐น๐ฎ ๐น๐ฒ๐ฐ๐๐๐ฟ๐ฒ : encourager, féliciter, dire l'importance mais aussi montrer l'exemple : lire soi-même, leur lire des histoires, les emmener en bibliothèque et librairie, posséder des livres...
- ๐๐๐ฉ๐๐๐ข๐ฃ๐ฃ๐๐ฅ ๐๐ ๐ฃ๐๐๐๐ฆ๐๐ฅ ๐ฑ๐ฒ ๐น๐ถ๐ฟ๐ฒ : leur lire des histoires et surtout poursuivre au-delà des premières acquisitions de décodage du CP. J'évoquais ces idées dans un article en avril 2020 : Mes 5 astuces pour faire de son enfant un lecteur.
- ๐๐๐ ๐๐ง๐๐ฅ ๐น'๐ฎ๐ฐ๐ฐ๐ฒฬ๐ ๐ฎ๐ ๐ป๐๐บ๐ฒฬ๐ฟ๐ถ๐พ๐๐ฒ : ne pas dire "Si tu lis un peu tu auras le droit de..." mais plutôt se mettre d'accord avec l'enfant sur un temps / rythme de visionnage d'écran raisonnable ; au pire interdire et laisser le choix entre ne rien faire, faire la vaisselle et lire : le cerveau humain a horreur de l'ennui ๐
Ce compte-rendu n'est bien sûr pas exhaustif et survol de multiples notions. Toute une partie consacrée à l'apprentissage du décodage est notamment particulièrement intéressante. Y sont détaillées les notions de VWFA (Visual Word Form Area), phonèmes, lettres hétéromorphes, conscience phonologique, etc. Michel Desmurget propose une présentation de son sujet claire, structurée et très intéressante. Je ressors de cette longue lecture à la fois plus riche de connaissances, rassérénée au sujet de l'importance accordée à cette passion au cœur de ma vie et de mon métier mais aussi, il faut l'avouer, un peu alarmée par certains constats détaillés. J'ai tous les jours face à moi des adolescents qui lisent de moins en moins et un fils à la charnière du décodage et de la "véritable" lecture. ๐๐ฒ ๐พ๐๐ผ๐ถ ๐ป๐ผ๐๐ฟ๐ฟ๐ถ๐ฟ ๐บ๐ฎ ๐ฟ๐ฒฬ๐ณ๐น๐ฒ๐ ๐ถ๐ผ๐ป, ๐บ๐ฎ ๐ฝ๐ฟ๐ฎ๐๐ถ๐พ๐๐ฒ ๐พ๐๐ผ๐๐ถ๐ฑ๐ถ๐ฒ๐ป๐ป๐ฒ ๐ฒ๐ ๐บ๐ผ๐ป ๐ฝ๐น๐ฎ๐ถ๐๐ถ๐ฟ ๐ฑ๐ฒ ๐น๐ถ๐ฟ๐ฒ.
[...] "intellos". Mot qui, pour nos enfants, relรจve dorรฉnavant quasiment de l'insulte. Une รฉvolution dont Ray Bradbury, auteur du mythique Fahrenheit 451, pressentait dรฉjร l'inรฉluctabilitรฉ, dรจs le dรฉbut des annรฉes 1950, lorsqu'il faisait dire ร l'un de ses personnages : "Pourquoi apprendre quoi que ce soit quand il suffit d'appuyer sur des boutons, de faire fonctionner des commutateurs, de serrer des vis et des รฉcrous ?"
Le dรฉcodage est au lecteur ce que la raquette est au tennisman : un รฉlรฉment essentiel mais inapte ร fonder l'expertise.
L'รฉcrit est un langage ร part, plus riche, divers et subtil que l'oral.
[...] Je pense qu'il est temps de renouer avec le mot. Je suis aussi coupable que quiconque d'avoir exaltรฉ l'image au dรฉtriment du mot. Mais seule une gรฉnรฉration de lecteurs engendrera une gรฉnรฉration d'รฉcrivains.
[...] les libraires et bibliothรฉcaires peuvent รชtre ici* d'un grand secours, par leurs compรฉtences (ร chacun son mรฉtier), mais aussi leur patience, souvent remarquable !
Plus l'enfant est entourรฉ de livres et de lecteurs, plus il a de chances de lire, de lire prรฉcocement, de lire beaucoup et, au bout du compte, de lire efficacement.