Oh happy day

Publié le 26 Avril 2020

Oh happy day

Adeline, après quatre ans de silence, je ne sais plus comment m’adresser à toi. J’ai essayé le chère Adeline, le bonjour Adeline, hello Adeline et jusqu’au ridicule coucou. Finalement j’ai estimé que le mieux, c’était juste Adeline.

Voici le compte-rendu d’une lecture confinée. Ce livre est en effet paru tout juste avant le confinement et a été acheté pendant. Oui, ma pile à lire disponible à la maison a fondu - comme un glaçon dans un mojito siroté lors d'une journée ensoleillée - et il est inconcevable de part ma passion et mon métier que je ne profite pas de cette période si particulière pour continuer à lire et chroniquer mes lectures. En voyant ce roman circuler sur les réseaux sociaux, je n'ai donc pas hésité bien longtemps à me le procurer : il faut dire que ces auteurs-là m'avaient déjà offert un beau moment de lecture il y a quelques années avec Et je danse, aussi. Jean-Claude Mourlevat et Anne-Laure Bondoux ont donc renouvelé l’expérience de l’écriture à quatre mains et publié une suite. Pour autant, les deux livres peuvent se lire indépendamment. Oh happy day, tout comme son aîné Et je danse, aussi nous fait ressentir le plaisir que les auteurs ont eu à l’écrire. De nouveau, c’est frais et réjouissant. Le personnage de Pierre-Marie est délicieux de malice et de tendresse et celui d’Adeline (dont il me semblait qu’elle était plus jeune) attachant de par ses efforts pour garder la tête hors de l’eau. Cette fois-ci, la forme du récit n’est pas intégralement épistolaire mais toujours aussi dynamique et les rebondissements teintés de noirceur. J’ai voyagé à Toronto et dans le fin fond de la Drôme, j’ai pleuré en apprenant le malheur vécu par Pierre-Marie dans la période d’entre les deux romans, j’ai ri notamment grâce aux personnages de Max et Josy, couple d’amis de Pierre-Marie que j’avais déjà adoré dans le premier opus. Oh happy day est un roman composé de multiples ingrédients qui donnent, non pas un salmigondis, comme dirait un des personnage, mais une comédie romantique parfaite pour s’évader en douceur, mouchetée de quelques réflexions sur la ponctuation que j’ai adoré. À dévorer et à partager dès les prémices du déconfinement.

Avec mes deux bras en vrac, j'ai mis deux heures quarante à taper ce mail. Je devrais faire comme Max, renoncer aux majuscules, aux points, etc., mais je ne peux pas signer de mon nom un texte débraillé, en aucun cas. Je crois que si je devais écrire un SMS urgentissime, Au secours ! par exemple, je serais capable de mettre ma vie en danger et de me faire choper avant de l'envoyer parce que j'aurais perdu quelques secondes fatales à vouloir à tout prix respecter l'espace entre le "s" de "secours" et le point d'exclamation.

C'est exactement moi ! 🤦🏻‍♀️

An elephant in the room, disent les Anglais. Il y a un éléphant dans la pièce et on parle de tout sauf de l'éléphant. Ceux qui ne savent pas ne le voient pas, et ceux qui savent font semblant de ne pas le voir. Alors on évolue autour de lui, on le contourne, on se plaque contre les murs pour parvenir à se déplacer, parce qu'il est énorme, l'éléphant, pachydermique, parce qu'il prend tout l'espace et qu'il est là en permanence. Même si c'est un petit éléphant de 24 kilos.

On pleure

À ce stade, Adeline commençait à s'imaginer dans le rôle d'une héroïne de film d'espionnage. Par chance , comme le lui avait rappelé Pierre-Marie, elle avait revu TOUS les Hitchcock en sa compagnie pendant l'hiver 2014. Elle était Ingrid Bergman dans Les enchaînés. Elle était Joan Fontaine dans Soupçons. Elle était Grace Kelly dans Le crime était presque parfait. Bref, elle était dans les emmerdes jusqu'au cou.

On rit

Tu as écrit que tu étais «tombée amoureuse» de moi. Ça m’a ému parce qu’il y a quelque chose de naïf et d’adolescent dans cette formulation. Merci de nous laisser croire qu’à nos âges et surtout au mien nous pouvons encore graver des cœurs sur les arbres.

On fond

Longtemps je me suis dit que je mourrais sans avoir pu décider au juste si la vie était une tragédie ou une grosse poilade. Aujourd'hui je sais qu'elle n'est ni l'une ni l'autre. Elle est juste là, sidérante d'inventivité, parfois difficile à tordre, mais parfois si incroyablement, miraculeusement, éperdument (merde pour les adverbes)... belle.

On apprécie

Laisser tomber la ponctuation ! Jamais ! Plutôt crever. Je suis prêt à renoncer à la bicyclette, au sexe, au bordeaux, mais à la ponctuation, jamais ! Imagine un peu à quoi ressemblerait une phrase sans point final
Ah, tu as vu ? C'est insupportable. Tu marches sur un joli chemin, en toute confiance, et soudain tu sens le sol qui se dérobe sous tes pieds, tu es précipité dans le vide. Il n'y avait même pas une petite barrière pour t'empêcher d'aller plus loin et de faire le pas de trop.

On savoure

Je me rappelle m'être autrefois déchaîné contre ces malheureux points de suspension. Je n'y voyais que paresse et dérobade. Mon jugement a changé. Dans les points de suspension, il y a le non-dit, les secrets, la pudeur. Ils sont finalement très érotiques, je trouve...

On sourit

Rédigé par Nota Bene

Publié dans #Je lis

Partager cet article

Commenter cet article