La femme brouillon
Publié le 1 Juillet 2019

Un court témoignage à la fois drôle et engagé sur la condition féminine et plus particulièrement la maternité. Divertissant et parfois rassurant. Une prose simple et sincère de femme brouillonne qui bouillonne de questions, de sentiments et de réflexions et qui essaye de poser des mots sur le bouleversant chemin de la maternité.
[Enceinte] Je me photographie, à la fois reporter et événement.
Je renifle le corps du bébé, je caresse du bout des doigts le corps du bébé. Il ne se passe rien d'autre que nous.
Moi, j'ai le cerveau bardé de post-it. Jamais je n'ai été si disponible à quelqu'un. Cette maman est d'une patience infinie. Il faut rassurer le bébé à coups de routine. Je vis au premier degré. Maintenir un petit humain en vie demande une organisation incroyable. [...] Pôle Emploi attribue des diplômes aux mères de famille nombreuse par le biais de ce qu'on appelle le transfert de compétences. C'est amplement justifié. Quant aux mères célibataires, il faudrait ériger des statues en leur honneur, quitte à déboulonner un ou deux militaires. Fini le temps mort, le temps mou, pendant lequel la pensée s'étire et s'offre des surprises. Le bébé se faufile dans le moindre interstice. Pire les activités sans lui sont les interstices. [...] J'ai besoin de sortir du corps, de stimuler mon intelligence. Sinon, comment tenir debout ?
L'ouvrier-maman trime pour construire un quotidien qui va de soi.
Comme toutes les femmes, je connais les regards qui évaluent, les mains qui s'autorisent, les sifflets dans la rue. Je sais les corps à vendre et les récits de viol de femmes que j'aime. Nous sommes toujours à portée de mains et de mots.
Ces citations sont celles qui me touchent le plus, mais comme je le disais, c'est parfois drôle, aussi :
Plutôt que de ringardes félicitations, beaucoup me gratifient de traits d'esprit sur mon soudain embonpoint, si bien qu'on me répète à longueur de journée que, dis donc, j'ai sacrément grossi. Je fais preuve à leur égard d'une patience toute maternelle.
Au moment de déclarer mes heures de travail en ligne, je coche la case "vous êtes en congé maternité". J'avais hâte de voir ce qui se passerait. Je m'attendais à une animation comme lorsque je réussissais à passer au niveau supérieur dans les jeux vidéos de mon enfance. Un feu d'artifice pixelisé, un bouchon de champagne qui saute. Mais le site déclare qu'il n'est plus responsable de mon cas et que je dois contacter la sécurité sociale au plus vite. Les institutions françaises m’ont toujours déçues.
Un court livre intéressant dans la veine féministe de mes lectures du moment. Si vous souhaitez quelques idées de lecture plus ou moins sur le même thème, vous pouvez lire mes retours sur Linea nigra, Le baiser dans la nuque, Un miracle en équilibre ou encore Maman. D'autres sont à venir prochainement : Et toi, tu t'y mets quand ? de Myriam Levain, On ne naît pas mère indigne, on le devient d'Olivia Moore ou encore Tu seras un homme féministe, mon fils d'Aurélia Blanc...